Société de l'Information Psychiatrique

Le quotidien du médecin

Delphine CHARDON – le 24 octobre 2005

Le régime de retraite complémentaire des praticiens hospitaliers, l’IRCANTEC, est déficitaire, selon le ministère de la Fonction publique, qui veut rééquilibrer les comptes au plus vite. Mais son projet de réforme est unanimement rejeté par les intersyndicats de PH, qui se mobilisent.

RARES sont les médecins hospitaliers qui savent exactement quels sont leurs droits à la retraite. Longtemps, le sujet n’a pas été la priorité des syndicats. Mais la donne vient radicalement de changer.

Ces derniers mois, le gouvernement a mitonné une réforme du régime IRCANTEC (1) – la retraite complémentaire obligatoire des PH -, contre lequel s’élèvent en bloc les quatre intersyndicats de PH (la CPH, la CMH, l’Inph et le Snam-hp).
Au cœur du débat, cette question : le régime IRCANTEC court-il à la faillite ? L’Etat l’affirme. Selon ses calculs, l’IRCANTEC entrera en déficit technique en 2013, et sera en cessation de paiement en 2025. Pour redresser la barre, le gouvernement propose une réforme coup de poing, reposant à la fois sur l’augmentation des cotisations et la baisse du rendement.

Les médecins hospitaliers ne sont pas seuls concernés. L’IRCANTEC regroupe 2,5 millions de cotisants, parmi lesquels des postiers, des élus et des militaires. Mais seuls les PH cotisent 40 ans d’affilée à l’IRCANTEC – depuis l’externat jusqu’à l’âge de 60 ou 65 ans. Ils prendront donc de plein fouet les effets de la réforme.
Dégringolade

Quelles seront les conséquences ? Les intersyndicats ont fait le calcul. «C’est la dégringolade : notre retraite IRCANTEC a déjà baissé de 25 % en 10 ans, et là, on risque de perdre 40 % d’un coup», affirme le Dr Alain Bocca (Inph). Dur à digérer. Surtout pour les jeunes générations, qui trinqueront le plus. « Comment faire accepter cela aux jeunes médecins, alors qu’on a déjà du mal à les faire venir à l’hôpital ? », questionne le Dr Bocca.

Une première tentative de réforme de ce régime spécifique avait été menée en 2003, mais vite abandonnée face à la mobilisation des grandes centrales syndicales, qui ont boycotté le conseil d’administration de l’IRCANTEC. Cette fois-ci, le ministère de la Fonction publique tient bon : il souhaite boucler le dossier avant la fin de l’année, pour une application dès le 1er janvier 2006 -avant les échéances électorales de 2007. Les textes qu’il a concoctés -un décret et un arrêté modifiant le fonctionnement de l’IRCANTEC- sont soumis à concertation depuis un mois. Demain, une nouvelle séance est prévue. Mais les grandes centrales s’indignent : aucune négociation n’est possible, disent-elles, le ministère de la Fonction publique ne voudrait pas changer une virgule de son projet.

Les organisations de PH pestent également car elles ne sont pas conviées aux discussions. Une délégation représentant les quatre intersyndicats de PH a tout de même été reçue jeudi dernier par le conseil d’administration de l’IRCANTEC, grâce à l’entremise du Dr Christophe Prudhomme (CGT), l’un des rares médecins à siéger à ce CA. Le Dr François Thuillier (CMH) était de la partie. Il raconte : «On a expliqué qu’on souhaite un audit indépendant, car on doute de l’analyse démographique et financière qui nous est présentée. On craint une crise des vocations à l’hôpital ; on a donc demandé à participer aux négociations » Le représentant du ministère de la Fonction publique a promis qu’il transmettrait la demande.

Mais les quatre intersyndicats de PH maintiennent la pression et promettent un mouvement social très dur avant la fin de l’année si le projet n’est pas retiré.

Du côté du ministère de la Santé, qui a décidé de débattre de la retraite des hospitalo-universitaires avant celle des PH, l’embarras est de mise. «Le projet de réforme de l’IRCANTEC est une bombe au milieu du débat statutaire, analyse le Dr Alain Bocca. On ne peut pas laisser de côté la retraite des PH. Espérons que l’on en parlera vraiment dans les réunions à venir à la Dhos».

(1) IRCANTEC: Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l’Etat et des collectivités publiques.