Société de l'Information Psychiatrique

La réforme du 3e cycle des études médicales se concrétise enfin après des années de réflexion


Publié le 27/02/17

Dossier en 4 parties

Le chantier de la réforme du troisième cycle des études médicales est en phase d’achèvement pour une livraison du nouveau modèle à la rentrée 2017-2018. La publication des maquettes est imminente, sans pour autant faire consensus. Après sept ans de réflexion, la réforme propose une formule évolutive et empreinte d’adaptabilité.

Partie 1/4

La refonte du 3e cycle des études de médecine a connu plusieurs gouvernements

La réforme de l’internat de médecine, débutée en 2010, semble s’être accélérée en 2014. Finalement, elle devrait s’appliquer à la rentrée 2017-2018. Mais si les principaux textes législatifs sont parus, il reste encore quelques réglages à préciser.

Après environ un septennat de rapports et de reports, la nouvelle donne issue de la réforme du troisième cycle des études médicales devrait finalement entrer en application à la rentrée 2017-2018. L’annonce a été faite officiellement dans le cadre de la grande conférence de santé en février 2016, faisant oublier le premier calendrier, qui évoquait la rentrée 2016-2017. Aujourd’hui, on peut facilement imaginer que l’échéance confirmée par plusieurs textes législatifs sera respectée. Récemment, le décret du 25 novembre 2016 a en effet précisé la nouvelle organisation des études en trois phases successives d’apprentissage des connaissances et compétences professionnelles.

Un consensus perturbé

En juillet 2015, Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales et de la Santé, et Thierry Mandon, secrétaire d’État à l’Enseignement supérieur et à la Recherche, nommaient le Pr Benoît Schlemmer, ancien doyen de la faculté de médecine de Paris-Diderot (Paris 7) pour finaliser la réforme de l’internat. Quelques mois plus tard, l’arrêté du 13 novembre 2015 détaillait la liste des diplômes d’études spécialisées (DES) de médecine donnant droit à la qualification de spécialiste et marquant une fois pour toute la disparition des diplômes d’études spécialisées complémentaires (DESC). Alors que tout semblait presque gravé dans le marbre, l’arrêté du 26 décembre 2016 déterminant pour la période 2016-2020 le nombre d’internes en médecine à former par spécialité et par subdivision semble de nouveau avoir semé le trouble dans cette grande refonte. Différents représentants d’étudiants notamment ont alors estimé que leurs spécialités étaient défavorisées. La mise en place par exemple du codiplôme entre l’anesthésie-réanimation (AR) et la médecine intensive-réanimation (Mir) est actuellement perturbée par un profond désaccord concernant le nombre d’internes à former dans chaque spécialité (lire notre article). Des mouvements de contestations se sont aussi élevés du côté des psychiatres.

Sept ans de réflexion

Globalement, l’histoire de cette rénovation des études semble avoir été semée d’embuches, prenant quelques années. Elle a réellement débuté en 2010 avec un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) associée à l’Inspection générale de l’administration, de l’éducation nationale et de la recherche (IGAENR). Ce travail fut suivi de plusieurs propositions de la Commission nationale de l’internat et du post-internat pour une refonte du dispositif, installée à l’époque par Roselyne Bachelot alors ministre de la Santé. Par la suite, les Prs François Couraud et François-René Pruvot ont réuni leurs propositions dans un rapport souvent cité comme fondateur de la nouvelle donne des DES (lire notre  article). Mais la course aux rapports ne s’est pas arrêtée là. François-Xavier Selleret, membre de l’Igas, et Patrice Blémont, inspecteur à l’IGAENR, ont été à leur tour chargés d’étudier les impacts statutaires, organisationnels et financiers (lire notre article).

À la veille de la mise en place de la réforme du troisième cycle, une meilleure visibilité sur les possibilités de carrières dans le secteur hospitalier s’impose de plus en plus. Le Centre national de gestion (CNG) a d’ailleurs anticipé la problématique en développant le logiciel Logimed et en le testant en Auvergne-Rhône-Alpes. À l’occasion de sa traditionnelle cérémonie des vœux, le CNG a donc annoncé le futur déploiement de son dispositif.

Partie 2/4

PR BENOÎT SCHLEMMER, EN CHARGE DE LA FINALISATION DU PROJET

« Même si l’on ne parvient peut-être pas tout de suite à un idéal, c’est un progrès considérable »

Après des années de réflexion et de concertation, la réforme du troisième cycle est dans sa dernière ligne droite. Elle se mettra en place progressivement, génération par génération. Son instigateur, le Pr Benoît Schlemmer, président de la commission dédiée à la réforme, rappelle qu’elle est faite pour s’adapter aux évolutions de la médecine.

Hospimedia : « La réforme du troisième cycle des études de médecine entre dans la dernière ligne droite de son instauration. Où en est-on aujourd’hui ?

H. : Combien de maquettes ont finalement été retenues ?

B. S. : Il y a les maquettes de quarante-quatre spécialités. Elles sont réparties en spécialités médicales, chirurgicales et biologie médicale. Le principal changement, c’est que toutes ces spécialités sont portées par des diplômes d’études spécialisées (DES), donc des diplômes qualifiants. Ils se substituent pour un certain nombre aux anciens Desc. Quasiment toutes les spécialités médicales seront maintenant portées par un DES. Le DES de chirurgie générale disparaît. Il y a aussi quelques nouveautés dans les spécialités médicales. Deviennent des DES des spécialités qui autrefois étaient portées par des diplômes d’études spécialisées complémentaires (Desc). Et une spécialité nouvelle s’ajoute : l’allergologie. Les effectifs prévisionnels de chacune des spécialités ont d’ailleurs été publiés par arrêté fin novembre. Ce texte sera revu en fonction du nombre d’étudiants classés à l’issue des épreuves classantes nationales (ECN) 2017. Un arrêté est attendu dans le courant du mois de juillet.

H. : Et concernant la durée de la formation, quelle option avez-vous retenue ?

H. : Vous avez évoqué des spécialités qui ont fait part de leurs inquiétudes. Il y en a d’autres. Comment les rassurer, alors que la publication des textes est imminente ?

B. S. : Nous avons beaucoup de contacts avec eux et nous en discutons. Au demeurant, il ne faut pas oublier que ce qui est d’ores et déjà prévu est tout de même une avancée et une modernisation considérables, par rapport à ce qui existe à présent. Et même si l’on ne parvient peut-être pas à un idéal comme certains pourraient le considérer, on peut raisonnablement penser qu’il y a un pas important qui est fait, dans l’organisation des parcours notamment, les exigences de formations, l’identification des compétences de chacune des spécialités, dans le suivi des étudiants et les moyens mis en œuvre pour assurer leur formation. C’est une réforme qui apporte énormément de choses et qui mérite d’être lancée. Si on ne le fait pas là, maintenant, alors qu’on y travaille depuis 2009 puis sous ma direction depuis juillet 2015, c’est terminé pour quelques années. Effectivement on est dans la dernière ligne droite. Il est normal qu’il y ait encore un certain nombres d’interrogations. Ça a été le cas aussi lorsqu’on a introduit la lecture critique d’article (LCA) dans les ECN ou lorsque les ECN informatisées ont été mises en place. Toutes les réformes prennent du temps et inquiètent toujours. Il faut regarder : qu’est-ce que cela apporte par rapport à ce qui existait ? Clairement, il y a dans la réforme du troisième cycle un progrès considérable. Oui, les choses ne sont pas idéales mais elles s’adapteront dans le temps. C’est cela qu’il faut considérer.

H. : Et concernant les surspécialités qui demandaient un DES ?

« Les choses ne sont pas gravées dans le marbre pour trente ans et nous aurons la possibilité de les faire évoluer. Si des spécialités estiment par exemple que quatre années de formation ce n’est pas suffisant, il n’est pas interdit d’imaginer des évolutions. »

H. : Vous évoquez aussi le caractère évolutif de cette réforme. Pouvez-vous l’expliquer ?

B. S. : Dans les grandes lignes, la réforme est déjà dessinée avec le décret du 25 novembre 2015. Il fixe l’armature juridique du troisième cycle des études médicales. Le reste est porté par voie d’arrêté. L’arrêté attendu va donc caler les choses au départ mais, comme c’est un arrêté, le document sera évidemment susceptible d’évoluer dans le temps, en fonction de l’évaluation et du suivi qu’on appliquera à la réforme. C’est un point extrêmement important, vis-à-vis aussi de certaines spécialités comme celles évoquées précédemment. Elles ont fait savoir qu’elles n’étaient pas entièrement satisfaites de ce qu’il leur était réservé. Il faut savoir qu’il a fallu tenir compte d’un certain nombre de contraintes. De ce que les spécialités avaient elles-mêmes au départ sollicité. Et puis surtout, il y avait tout de même un certain nombre de contraintes administratives et budgétaires imposées par les pouvoirs publics et dont il n’était pas possible de s’affranchir. Mais il a toujours était dit par les ministères, et je l’ai toujours relayé : l’ensemble de la réforme étant porté par des textes qui sont des arrêtés — donc assez facilement révisables — , les choses ne sont pas gravées dans le marbre pour trente ans. Nous aurons la possibilité de les faire évoluer. Si des spécialités estiment par exemple que quatre années de formation ce n’est pas suffisant, il n’est pas interdit d’imaginer, compte tenu des besoins de santé et de l’évolution de la médecine, accroître leur temps de formation. Cela dépendra de la façon dont les choses se mettent en place et du bilan qu’on en fait.

H. : Le comité de suivi annoncé veillera à l’établissement de ce bilan ?

B. S. : C’était une volonté : j’ai demandé un comité de suivi de la réforme. Cela a été retenu et figure dans le décret. On donne les garanties pour voir comment les choses vont se mettre en place et si le contenu des maquettes est bien régulièrement remis à jour. Il est acquis que, s’il y a des évolutions à prendre en compte et des modifications à apporter aux différents DES, elles se feront. Évidemment cela nécessitera du travail mais elle se feront le moment venu. Le maître-mot, et que j’ai répété à l’envi aux enseignants comme aux étudiants, c’est que le système sera évolutif et adaptable.

« La montée en puissance progressive est d’ailleurs la raison pour laquelle un certain nombre de choses ne seront pas tout à fait calées au démarrage. […] L’important est de démarrer avec la première génération : l’urgence est d’assurer la rentrée 2017. »

H. : La mise en place sera progressive. Le calendrier initial est-il maintenu en cette fin de quinquennat ?

B. S. : La première génération d’étudiants qui va être concernée est celle qui passe les ECN au printemps 2017. Ensuite cela va monter en charge progressivement. Pour les générations antérieures, on continue dans le système actuel des DES et Desc jusqu’à extinction de la formation initiale de ces générations-là. Il n’y aura pas rupture. La montée en puissance progressive est d’ailleurs la raison pour laquelle un certain nombre de choses ne seront pas tout à fait calées au démarrage. Parce qu’on a encore un peu de temps devant nous. L’important est de démarrer avec la première génération : l’urgence est pour eux d’assurer la rentrée 2017. »
Partie 3/4

La concertation sur les maquettes de formation pourrait se prolonger jusqu’en avril

Syndicats et associations d’étudiants en médecine ne cachent pas leurs inquiétudes quant à la concrétisation de la réforme. Le 24 février, il semble que le dialogue ait été de nouveau instauré entre étudiants et ministères de tutelle. L’arrêté attendu pourrait être scindé en deux, pour poursuivre la concertation sur les maquettes jusqu’en avril.

Chirurgiens, urgentistes, anesthésistes-réanimateurs, gastroentérologues, psychiatres… Les professionnels et collèges de spécialités sont nombreux à avoir fait part, durant les dernières semaines, de leurs inquiétudes au sujet de la concrétisation de la réforme du troisième cycle des études médicales. Ces derniers jours, ce sont les étudiants, premiers concernés par cette refonte de leurs cursus, qui sont montés au créneau. Avec les échéances électorales de mai et juin, ils craignent notamment d’être les laissés-pour-compte de la concertation. Ce 24 février, quatre jours après avoir demandé « un rendez-vous d’urgence » par voie de communiqué, l’Intersyndicat national des internes (Isni) a été reçu par la DGOS et le cabinet de Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales et de la Santé. Il a obtenu, a confié à Hospimedia son président Olivier Le Pennetier, la poursuite de la concertation.

Un mois de concertation supplémentaire

L’arrêté, initialement attendu début mars (lire la partie 2 du dossier), pourrait ainsi être scindé en deux. La partie haute, qui fait consensus, serait bien publiée avant le printemps. En revanche, la publication de l’ensemble des quarante-quatre maquettes de diplômes d’études spécialisées (DES), prévue en annexe, serait repoussée à début avril dans un arrêté indépendant. Le temps de réinstaurer le dialogue. « Les ministres […] veulent une réforme avant l’échéance présidentielle de mai 2017, quitte à bafouer le principe de concertation des principaux intéressés« , a expliqué l’Isni le 20 février.
Quelques jours plus tôt, l’ensemble des formations étudiantes ont reçu « un brouillon » de projet d’arrêt. Soixante-dix articles et des centaines de pages, sur lesquelles elles n’ont pas manqué de transmettre aux ministères leurs annotations, craignant toutefois une publication dans la précipitation. « Nous avons jusqu’ici ressenti auprès de la DGOS et du ministère une grande écoute. Nous avons joué le jeu de la concertation et apporté nos contributions« , explique le porte-parole de l’Intersyndicale nationale autonome représentative des internes en médecine générale (Isnar-IMG), Stéphane Bouxom, qui regrette que la concertation ait été si tardive. Même scepticisme du côté de l’Association national des étudiants en médecine de France (Anemf) : « Les maquettes représentent 200 pages. Et nous avons peur de n’avoir que 72 heures maximum pour étudier le tout avant publication« , a expliqué le vice-président en charge des perspectives professionnelles, William Gens. D’autant que la génération de futurs internes qui passeront les épreuves classantes nationales (ECN) avant l’été, souhaiterait savoir quelles seront les maquettes à leur disposition, pour choisir leur orientation en connaissance de cause, insistent les représentants étudiants.
Ce 24 février, il semble donc que les requêtes étudiantes aient été entendues. « Nous avons demandé des garanties et nous avons obtenu la mise en place de réunions hebdomadaires et donc un mois de délai supplémentaire concernant les maquettes« , se réjouit Olivier Le Pennetier, qui attendait confirmation de l’information avant une nouvelle rencontre programmée à la DGOS ce 27 février. Contactée par Hospimedia, la DGOS n’était pas, à l’heure où nous publions, en mesure de confirmer cette information. Un complément devrait être apporté dans les jours à venir.
Partie 4/4

La revalorisation de la pédopsychiatrie est au cœur des enjeux pour la maquette du DES psychiatrie

L’orientation retenue par les ministères pour la maquette de psychiatrie serait un DES, avec le maintien d’une option pour la psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent. Mais l’idée d’un co-DES n’est pas enterrée pour autant. Un point fait consensus entre les acteurs : la nécessité prégnante de revaloriser la formation de pédopsychiatrie.

La réforme va semble-t-il accoucher, pour la psychiatrie, d’un diplôme d’études spécialisées (DES) de psychiatrie où la pédopsychiatrie devient une option du DES. Certains universitaires de pédopsychiatrie militaient cependant pour un co-DES « en Y », avec un tronc commun d’études au début de la formation, puis deux branches de spécialités : psychiatrie adultes ou pédopsychiatrie. Auditionnée au Sénat début février, la directrice générale de la DGOS, Anne-Marie Armanteras-de Saxcé, a annoncé qu’en l’état actuel des travaux, l’option de spécialité pour la pédopsychiatrie, « même si ce n’est pas encore tranché, est plutôt l’option qui est retenue :  elle sera bien de un an et sera faite au terme du DES dans le cadre d’une cinquièmeannée« .
Sur la proposition de création de ce co-DES, la DGOS a relevé, après avoir dressé un tableau sombre de la démographie des pédopsychiatres (lire notre article), que cela « supposerait qu’il y ait suffisamment dans le territoire d’unités encadrées par des pédopsychiatres universitaires« . Le Pr Benoît Schlemmer, chargé de mission sur cette réforme du troisième cycle, confirme à Hospimedia, dans un entretien le 22 février (lire notre partie 2 de dossier), le « maintien d‘une formation de la psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent dans le DES« . « Nous maintenons une option qui ajoute une année de formation au DES de psychiatrie, qui progressivement se substituera » au diplôme d’études spécialisées complémentaires (Desc) de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent actuel. « Ce système n’est pas totalement satisfaisant mais pour le moment il n’y a pas d’alternative, parce que le nombre d’enseignants en pédopsychiatrie est trop limité« , explique Benoît Schlemmer.

L’idée d’un co-DES fait débat

Si l’impérieuse nécessité de revaloriser la pédopsychiatrie fait consensus — comme le montrent les auditions de la mission parlementaire en cours sur la psychiatrie des mineurs —, la place du curseur de la spécialisation en pédopsychiatrie au sein de la formation des futurs psychiatres est plus discutée. Dans une lettre adressée aux ministères concernés en novembre dernier, dont Hospimedia a eu copie, le président de la sous-section de la pédopsychiatrie du Conseil national des universités (CNU), le Pr David Cohen, chef du département de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent à la Pitié-Salpêtrière à Paris, plaide, au nom des universitaires de la spécialité, pour « un co-DES à choix tardif« . Il fait alors part de « sa profonde inquiétude quant à la manière dont la réforme se dessine« . Selon ces universitaires, la configuration en co-DES aurait plusieurs avantages. Elle permettrait de favoriser une proximité avec la psychiatrie d’adulte et de répondre aux enjeux de fond en matière de formation. Elle garantirait la concordance minimale au format européen (six semestres de formation au minimum dans la discipline). Enfin, elle permettrait « d’anticiper sur les réformes inévitables du système de santé qui s’imposeront plus que jamais aux psychiatres d’enfant et d’adolescent d’être au cœur d’une organisation en pratiques avancées(avec les infirmiers) et en parcours de soins pluridisciplinaires

(avec les psychologues, éducateurs, orthophonistes, psychomotriciens, etc.)« .
Mais ce co-DES n’a pas la faveur de

s internes. En effet, la présidente de l’Association française fédérative des étudiants en psychiatrie (Affep), Bénédicte Barbotin, explique qu’une récente enquête auprès de plus de 900 internes en psychiatrie a montré qu’ils souhaitent à une très large majorité (81%), maintenir un DES de psychiatrie avec la possibilité d’options. Ceci afin de garantir une formation des futurs praticiens sur l’ensemble des troubles et leur évolution, depuis la petite enfance jusqu’à l’âge adulte. Et l’Affep d’exprimer par ailleurs la crainte que la création d’un co-DES n’ouvre finalement la voie dans le futur à deux DES distincts et deux professions différentes.

Des pistes pour revaloriser l’exercice

Le Collège national des universitaires de psychiatrie (CNUP) demande pour sa part que la réflexion concertée avec les ministères permette de réactualiser les effectifs universitaires à la mesure des besoins de formation, de soins et de recherche, au regard des demandes croissantes faites à la pédopsychiatrie (lire l’encadré). Actuellement, il n’y a en effet qu’une cinquantaine de diplômés du Desc pédopsychiatrie par an (sur des promotions de 500 internes de psychiatrie). Il faudrait, explique le Pr Pierre Thomas, président du CNUP, environ un tiers de pédopsychiatres par promotion, si l’on considère le ratio actuel entre secteurs de psychiatrie infanto-juvénile et secteurs de psychiatrie générale sur le territoire. Le CNUP propose donc « de fixer le nombre d’universitaires et le nombre minimum de pédopsychiatres à former chaque année en France« .
L’Affep diverge sur ce point, écartant l’idée d’un effectif d’étudiants obligatoire. Elle préfèrerait attirer les étudiants dans la spécialité en la revalorisant d’une autre manière. Notamment, avec la mise en place d’une « option ouvrant à un exercice exclusif mais non limitant« * pour les internes suivant cette formation — une proposition également défendue par le CNUP. Une autre mesure d’attractivité est attendue, souligne l’Affep : la revalorisation financière des consultations des pédopsychiatres, souvent longues — mais la satisfaction de cette revendication ne dépend pas de cette réforme.
Quelle que soit la version finale de la maquette, « rien n’est gravé dans le marbre » grâce à la souplesse laissée par les arrêtés qui formaliseront les DES, a répété Benoît Schlemmer, lors d’une audition au Sénat le 24 février. « Le co-DES, c’est probablement la direction vers laquelle il faudrait aller, elle n’est en rien écartée« , a-t-il estimé. « Si l’on avait voulu une action très forte, on aurait créé ce co-DES« , a-t-il confié. Mais les effectifs universitaires sur l’ensemble des CHU « s’y opposent pour l’instant« . Et, « détail » non négligeable, a-t-il ajouté, pour mettre sur pied cette formation en Y, il faut aussi que les différentes spécialités arrivent à s’entendre entre elles, sur les objectifs pédagogiques et professionnels requis et les effectifs à allouer à l’une et à l’autre des deux branches de la formation. Et d’insister sur le fait que « c’est un préalable majeur » pour faire éventuellement évoluer la formation à l’avenir.

Des demandes d’options en psychiatrie non retenues

Au regard des fortes « demandes sociétales » adressées à la psychiatrie, un « mouvement d’union nationale » — à travers les représentants des internes, universitaires, experts judiciaires, etc. — a interpellé fin janvier les pouvoirs publics pour réitérer leur demande de mise en place de deux autres options dans le DES, au côté de la pédopsychiatrie : psychiatrie médico-légale et psychiatrie de la personne âgée. « Ces trois champs de compétence sont essentiels pour répondre aux évolutions socio-démographiques actuelles et nécessitent une formation spécifique d’une année supplémentaire« , ont-ils expliqué. Mais ces options n’ont pas été retenues par les ministères, annonce Benoît Schlemmer. « Les pouvoirs publics, pour le moment, tiennent au fait qu’il ne faut pas saucissonner la spécialité« , explique-t-il. Et d’ajouter que les psychiatres « généralistes » doivent recevoir une formation de la psychiatrie de la personne âgée et de la psychiatrie médico-légale dans le DES. Mais, répète-t-il, là encore, cette configuration « pourra évoluer dans le temps« . Selon nos informations, à défaut d’options, il devrait être proposé dans la réforme des parcoursde formation avec des « compétences additionnelles« .
* Actuellement, le Desc de pédopsychiatrie n’est pas obligatoire pour exercer en tant que psychiatre en pédopsychiatrie. Avec le DES, seuls les internes ayant suivi l’option pourront être pédopsychiatres. Mais ils pourront aussi être psychiatres d’adultes.
Caroline Cordier, Clémence Nayrac et Lydie Watremetz